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lundi 2 mai 2022

Récit d’un chantier participatif de charpente traditionnelle dans le Tarn

Joseph B., est membre de la branche locale "Normandie" du RAF. Il est bénévole sur un chantier-école participatif de charpente où se transmettent des savoir-faire traditionnels. Il partage son expérience et le contexte de cette aventure avec le RAF à travers la rédaction d’un article que voici :

Entre mars et juin 2022 se déroule un chantier participatif de charpente dans la ville de Cordes-sur-Ciel (Tarn). Le projet est initié et soutenu par les artisans de l’entreprise SNRB et l’association du Moyen Âge à nos jours fondée par Pascal Waringo. La motivation première de ce chantier de charpente est de proposer un lieu et un temps propices à l’initiation et l’apprentissage de techniques manuelles et de méthodes efficaces pour réaliser des charpentes à partir des arbres sur pied. Deux mois après son lancement, de nombreuses expériences et copeaux de bois se sont déjà accumulés. Différents intervenants ont pu apporter leur expertise sur des dimensions variées et parfois nouvelles du métier de charpentier. Ainsi la tracéologie nous ouvre à la lecture du bâti ancien (avec B. Brigaud), l’introduction à l’affutage des outils (haches, ciseaux, scies) nous permet d’apprendre à les connaître et à les soigner tout au long de leur usage (avec T. Coudert). Deux interventions, « La forêt du néolithique à nos jours » par l’archéologue Vanessa Py-Saragaglia et « La conservation du massif forestier de la sainte-Baume » par l’historien Sylvain Burri, nous donnent un point de vue historique sur la définition de la forêt, son apparition, son évolution, ainsi que sur le travail du bois, tout comme les usages associés aux arbres et aux forêts au cours de l’histoire.

Depuis l’arbre jusqu’à la pièce taillée, nous découvrons le ceinturage des arbres et leur coupe raisonnée (avec P.Waringo) en même temps que l’équarrissage à la hache (avec D.Cahute) directement en forêt, avant de réaliser le piquage en atelier (avec M.Verdon). Chaque étape nous oblige à entrer dans un rapport fin, sensible et sensé à la matière vivante et ligneuse qu’est le bois. Il faut préciser que l’équarrissage à la hache et le piquage sont deux techniques aujourd’hui absentes des formations conventionnelles de charpente. L’équarrissage consiste à passer d’une grume à une poutre en taillant quatre faces parallèles deux à deux de section carrée ou rectangulaire. L’équarrissage nécessite de travailler avec du bois vert.

Le piquage est une technique de tracé d’assemblages particulièrement adaptée aux bois irréguliers. Ces savoir-faire permettent à l’artisan de s’adapter au mieux aux particularités du bois et donc aux singularités historiques de l’arbre dans son environnement.
Cette perspective est de taille et l’enjeu de la transmission de ces techniques est tout aussi grand. En effet ces étapes de transformation sont liées et s’influencent nécessairement. En piquant on voit où améliorer l’équarrissage, et en équarrissant on pense au piquage, à chaque étape on observe la pièce de bois et on repense à l’arbre qui a précédé la grume etc. Ainsi c’est à une autre manière d’apprécier l’arbre que l’on accède. En pensant à toutes les étapes qui permettent sa transformation on commence à être attentif à certains détails et indices qui nous permettent de choisir des arbres.
Or si ces techniques permettent aux charpentiers de lire et de choisir les arbres, leur lecture au sein de l’écosystème forestier relève avant tout des métiers associés à leur gestion. C’est donc à travers l’attention croisée de l’artisan et du forestier que l’arbre peut être transformé sans pour autant disparaitre.

"Cette conscience est au cœur des motivations du RAF, elle émerge dans notre apprentissage à travers ces techniques et ce respect du bois et de l’arbre."

Joseph B., le 2 mai 2022